Par une matinée lumineuse de mai 1664, le peintre quitte son atelier pour se fournir en couleurs chez l'apothicaire. Amsterdam bruit alors d'une étrange effervescence. Hommes, femmes, enfants se dirigent vers la grande place du Dam, irrésistiblement attirés par le spectacle de la mort. Non pas que les exécutions publiques soient rares, mais c'est une Danoise de dix-huit ans qui est aujourd'hui condamnée à la strangulation. L'artiste s'écarte de la foule et saisit à la plume quelques heures plus tard le corps et le visage sans vie de la jeune fille. Margriet De Moor (Le virtuose, NB décembre 1995) évoque Rembrandt sans le nommer, sexagénaire au moment du drame, ruiné, douloureusement éprouvé par la perte de sa femme, et cependant toujours possédé par la peinture. Aux ocres profonds, noirs, rouges travaillés par le peintre, s'oppose la blancheur étincelante des paysages hivernaux que traverse l'étrangère, accourant sans le savoir vers sa fin tragique. Le contexte historique, le bouillonnement de la cité portuaire sont habilement restitués, présent et passé se mêlent dans une construction adroite, parfois un peu déroutante, et la passion de l'auteur pour les arts filtre à travers une écriture précise et sensible. (source : les-notes.fr)