Sichuan, au bord du Yang-Tsé, années cinquante. Xi Yan et Yongmin ont un fils, Kewei. Elle, illettrée, besogneuse, lui rêveur, aquarelliste traditionnel, sont des « paysans moyen riches ». Kewei grandit sous Mao avec « la grande famine » et la révolution culturelle. Il a hérité du talent de Yongmin, mais, formaté par les dictats politiques, il découvre le caractère féodal, condamnable, de la peinture paternelle. Il s'applique à devenir un maître de l'art prolétaire, prend du galon maoïste, distribue bons et mauvais points aux artistes. Devenu père, les rebonds de la vie le rattrapent. Après Les âmes rouges (NB mars 2016), Paul Greveillac reprend le thème de la créativité asservie au pouvoir en pays totalitaire. Littéraire diplômé de sciences politiques, il livre, sur une toile de fond historique, un opus truffé de citations, documenté comme une thèse, vivant, aux protagonistes à forte densité humaine et à la psychologie travaillée. Maître et esclave du système, le héros principal, peintre doué, arriviste intrigant mais crédule, pas vraiment mauvais bougre, cible les iconoclastes contre-révolutionnaires ou déviationnistes pour les faire éliminer. Ce roman formidable, servi par une plume accomplie, éclaire subtilement plus de trois décennies chaotiques de la Chine populaire. (C.R.P. et B.Bo.) (source : les-notes.fr)